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Fondation 15 août 2017

Journal du Dimanche #2: A la poursuite des animuscules

Bvlgari est fière de soutenir les projets scientifiques de la Fondation Race for Water
et de contribuer ainsi à préserver l’eau, la ressource la plus précieuse de la planète.

Environnement : Suite de l’aventure scientifique, à bord du « Race for Water », que le navigateur et alpiniste Eric Loizeau partage avec le JDD

Caraïbes : A cuba, l’équipe de chercheurs se livre à une journée de prélèvements en mer

Dans le silence feutré de ses moteurs électriques, le catamaran Race for Water pénètre dans le chenal du port de La Havane. Nous longeons l’esplanade de bord de mer bordée d’immeubles pastel, d’églises hispaniques, de palais rococo, et empruntée par ces fameuses américaines décapotables de toutes les couleurs qui datent des années trente 1930. Une dizaine de scientifiques cubains et norvégiens discutent sur le pont supérieur et commentent un verre à la main leur journée de travail pendant que l’équipage s’affaire à préparer l’accostage sous l’œil de Pascal Morizot, le capitaine.

Carlos Manuel Alonso

Hans Peter Arp

Contribuer à la recherche scientifique en accueillant à bord des équipes internationales de chercheurs est un des objectifs prioritaires de Race for Water. Dès 2017, la fondation a passé des accords de partenariat avec les organismes environnementaux JPI Oceans et Plankton Planet. Amorcé en 2011, JPI Oceans est un programme stratégique de coordination sur la recherche marine ouvert aux états membres européens et aux pays associés. Parmi les initiatives conjointes lancées par JPI Oceans, le programme « Ecological Aspects of Microplastics » regroupe quatre projets autour des microplastiques, dont Ephemare et Weather-Mic, auquel appartiennent les trois Norvégiens embarqués avec nous à Cuba. Quant au projet Plankton Planet, dont je suis ambassadeur, il a pour objectif d’étudier la biodiversité planctonique et sa santé dans tous les océans de notre planète. Il est porté par des chercheurs du CNRS et de nombreux navigateurs citoyens qui, comme ceux de Race for Water, récoltent du plancton marin au cours de leur navigation. Echantillons analysés ensuite par des experts internationaux en océanographie. Les données produites fourniront une information primordiale pour mesurer la biodiversité planctonique dans les mers où peu d’observations sont possibles. Cette étude peut aider à anticiper la menace qui pèse sur le cycle de la vie et donc sur l’homme.

60% de notre système est produit par le plancton

Voici quelques éclaircissements concernant ces indispensables animuscules que m’a donnés la chercheuse cubaine Rosely Peraza Escarrá, qui est une spécialiste. Le plancton, qui regroupe tous les organismes dérivant au gré des courants (phytoplancton et zooplancton), est à la base de la chaîne alimentaire et produit par photosynthèse environ 60% de l’oxygène que nous respirons, presque plus que nos forêts. Il est aux avant-postes des changements environnementaux et réagit rapidement aux diverses variations du milieu, qu’elles soient liées aux pollutions ou aux évolutions climatiques. Aujourd’hui, la méconnaissance de la biodiversité et de l’évolution du plancton est un des plus grands freins à la modélisation du fonctionnement de notre biosphère et à la prédiction des changements écologiques planétaires. Or, depuis la fin du siècle dernier, il apparaît en nette diminution. Cette disparition inquiétante serait en partie due à la pollution atmosphérique mais aussi à la pollution plastique des océans. C’est la raison des études parallèles, pollution plastique et situation du plancton, menées ces trois jours à bord de Race for Water.

Opération Manta

Maintenant, c’est le branle-bas de combat sur la plage arrière. L’équipe internationale de chercheurs est déjà à l’œuvre sous la direction de Hans Peter Arp et Carlos Manuel Alonso, les patrons des équipes scientifiques. C’est un amoncellement d’éprouvettes, de bocaux divers, je me demande comment ils s’y retrouvent. Juchés en équilibre sur la plate-forme arrière, Anne-Laure Le Duff, second capitaine, et Martin Gavériaux, ingénieur de bord, s’affairent autour d’un fouillis de cordages, car ce matin nous lançons l’opération Manta. Le filet Manta est une sorte de grand filet à papillons que l’on traîne derrière le bateau à petite vitesse pendant trente à quarante-cinq minutes, sauf que l’on ne récupère pas de lépidoptères mais un échantillon d’eau de mer. La première prise se déroule près de la sortie du port, à moins de 1 mille (1 852 m), et le récipient que l’on remonte à bord est encombré d’une matière boueuse qui ravit nos chercheurs. Le Dr Hans Peter Arp m’explique : « Tu vois tous ces minuscules points bleus ou blancs au milieu des débris d’algues et de matière organique ? Ce sont ces microplastiques qui envahissent les océans et dont nous étudions l’impact sur la faune. » En parallèle, l’équipe cubaine dirigée par Carlos Manuel Alonso s’occupe de récupérer des sédiments marins à l’aide d’une sorte d’araignée en inox qu’on dépose sur le fond au bout d’une ligne de sonde. Carlos m’explique que l’analyse des sédiments présents sur les fonds marins est aussi importante que celle de l’eau de mer car, contrairement à ce que l’on pensait jusqu’ici, la concentration de microdéchets y est aussi importante et nuisibles sur le plan environnemental.

Pendant le déjeuner, Carlos et Hans Peter se félicitent des aménagements du bateau qui facilitent leur travail. En effet, lorsqu’en2016, la fondation Race for Water a repris le navire (ex-Planet Solar), son intérieur a été entièrement modifié en vue de cette odyssée : à l’arrière, une plate-forme de travail de 40 m2 équipée d’un treuil pour les prélèvements avec deux accès directs à la mer, un laboratoire sec, climatisé, indépendant, équipé d’un frigo, d’un congélateur, d’une étuve et d’un vrai plan de travail, un escalier amovible pour des plongeurs, soit plus de 100 m2 d’espace de travail flexible. En outre, le silence des moteurs électriques et l’absence d’émanations de carburant ne dérangent pas la faune, sans compter le déplacement à faible vitesse et la stabilité du catamaran qui facilitent les prélèvements.

C’est d’ailleurs, la seconde phase du processus : l’analyse des échantillons d’eau de mer, ou plutôt la préparation des échantillons qui seront traités à terre. Les chercheuses Arianna Garcia Chamero et Linn Merethe Brekke Olsen s’en chargent, transportant avec précaution les délicats flacons de verre. Dans le soir qui s’installe doucement, notre bateau rejoint furtivement son poste de mouillage au fond d’une darse étroite, bordée de bâtiments délabrés. Un dernier rayon de soleil et la ville s’illumine, colorée comme un arc-en-ciel. Magique.

 

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