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Fondation 28 juin 2017

Des scientifiques montent à bord !

Ce mercredi, les scientifiques du projet EPHEMARE, rassemblant 10 pays européens et 15 partenaires, montent à bord. Récoltes, échantillonnages et analyses des plastiques des eaux bermudiennes : le programme s’annonce chargé. Jérôme Cachot, enseignant-chercheur au laboratoire EPOC de Bordeaux, présente l’étude qu’il s’apprête à conduire avec ses collègues européens. Rencontre.

 

Race for Water : Que venez-vous étudier à bord du navire Race for Water ?

Jérôme Cachot : Nous venons aux Bermudes afin d’étudier la contamination par les microplastiques et leurs effets sur les espèces aquatiques, que ce soit sur les invertébrés ou les poissons. Dans notre laboratoire (le laboratoire EPOC rattaché au CNRS et à l’Université de Bordeaux, ndlr), nous évaluons les effets deux types de micro-plastiques : certains sont « propres » autrement dit vierges de polluants, d’autres ont été artificiellement ou naturellement contaminés par des pollutant. Grâce au navire Race for Water, nous avons l’occasion de récolter des micro-plastiques pollués de manière naturelle qui se trouvent dans l’environnement. Ces derniers nous permettent d’avoir une idée de la pollution réelle dans les zones d’accumulation de plastiques au sein des océans.

 

R4W: Cela signifie que vous étudiez une pollution qui est transportée par les microplastiques ?

JC : Effectivement, lorsque les plastiques séjournent dans l’océan, ils se chargent en substances polluantes qui se trouvent dans l’eau comme par exemple les PCB (polychlorobiphényles). Dans l’eau ces polluants ne sont pas solubles et flottent. Mais ils présentent une forte affinité pour la matière organique et les matières plastiques et sont attirés par ces dernières. En captant les polluants, les plastiques sont un lieu de concentration des pollutants. Durant l’Odyssée de 2015, nous avons pu démontrer la présence d’une grande quantité de micro-plastiques sur les plages des Bermudes et avons pu évaluer leur contamination et leur toxicité. Aujourd’hui le défi est d’aller regarder ce qui se passe dans l’eau et les sédiments. Etudier la diversité des molécules captées par les plastiques afin d’appréhender leur dangerosité. Ensuite nous analyserons l’impact que cette pollution invisible a sur l’ensemble de la chaine alimentaire.

Collecte de microplastiques sur les plages durant l’Odyssée de 2015

 

R4W : En quoi la diversité des molécules polluantes est-elle dangereuse ?

JC : Les polluants actuels sont majoritairement d’origine synthétique (produits par l’Homme, ndlr) et composés par l’association de plusieurs molécules. Actuellement, 10 000 substances polluantes sont utilisées en Europe. La toxicité d’une molécule, lorsqu’elle est isolée, est généralement connue car l’Europe impose de vérifier l’innocuité de la substance avant sa commercialisation. Par contre, une fois dans l’environnement, elle se trouve en interaction avec d’autres molécules. Ces interactions peuvent changer la toxicité de base des molécules et nous n’avons encore peu d’idées sur la toxicité réelle des mélanges de polluants. En captant de nombreux polluants libres dans le milieu aquatique, les micro-plastiques peuvent donc s’avérer plus toxiques que les plastiques d’origine. Les échantillonner puis tester leurs effets sur le développement d’organismes marins nous permettra d’avoir une meilleure idée sur la toxicité réelle des plastiques vieillis en mer.

 

R4W : Pourquoi avoir choisi le navire Race for Water ?

JC : Nous avions déjà travaillé en 2015 avec la Fondation sur une première cartographie de la distribution des micro-plastiques sur les îles situées à proximité des gires océaniques. Cette étude nous servira de point zéro des niveaux de microplastiques sur les plages océaniques. Maintenant, il faut aller plus loin et voir ce qui se passe directement dans les eaux des Bermudes par exemple, afin de mieux appréhender l’impact de cette pollution. Le navire de la fondation Race for Water possède les infrastructures nécessaires à cet échantillonnage et aux analyses que nous souhaitons faire. C’est un plaisir de continuer l’aventure. Et puis, grâce à ce navire emblématique, nous avons l’occasion de sensibiliser le grand public tout en participant à son éducation. C’est un rôle que j’estime devoir jouer en tant que chercheur.

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